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« Le droit commun, premier recours pour l’insertion professionnelle »

depuis le jeudi 19 octobre 2006
Patrick GOHET | Délégué interministériel aux personnes handicapées

Tout d'abord je voudrais vous dire combien je suis satisfait de voir à quel point une réunion comme celle-ci peut réunir une telle audience. Et saluer la diversité de l'auditoire : les responsables publics, les élus, les responsables administratifs, mais aussi les représentants des entreprises, et tous les membres actifs de ce secteur. Rien ne se ferait en matière de politique du handicap sans toutes ces organisations qui réussissent à dégager entre elles un certain nombre d'objectifs communs, au service de valeurs communes. Je voudrais les saluer car je sais à quel point, tant les responsables et les militants bénévoles que les professionnels qui travaillent à leurs services, concourent à ce que les pouvoirs publics soient éclairés sur les mesures qu'il convient de prendre.

La question de l'emploi dans notre pays, la loi vient de le confirmer, est réglée à trois niveaux, à savoir le secteur protégé, le secteur adapté et le milieu ordinaire.

Le premier niveau concerne le travail protégé.
Je tiens à rappeler que le CAT est un établissement médico-social, et non une entreprise. Un établissement médico-social, même s'il a en plus de sa mission sociale une fonction économique, n'emploie pas de salariés, mais accueille des usagers.
Si nous n'étions pas vigilants pour préserver cette identité du CAT, nous exposerions les usagers de ces établissements à une requalification de ces structures en vertu de tout le dispositif sur la concurrence.
Il s'agit donc d'abord de préserver l'identité des Centres d'Aide par le Travail. Cela ne leur interdit absolument pas d'être le plus actifs possible dans le domaine économique ou d'avoir une collaboration étroite avec un certain nombre de donneurs d'ordres, en particulier les collectivités territoriales. Mais il faut veiller à ne pas exposer les CAT à un risque de requalification en contentieux.

Ensuite, le deuxième niveau concerne l'emploi adapté. Toute une réflexion a été conduite, et on est passé du statut « d'atelier protégé » à celui « d'entreprise adaptée » (EA). Je sais que dans votre groupement vous avez un nombre conséquent à la fois d'ESAT (CAT) et d'EA.
L'entreprise adaptée doit opérer sa mue, car elle ne peut plus être gérée tout à fait de la même manière. Il lui faut tirer toutes les conséquences du passage d'un statut de protection à un statut d'adaptation. En ce qui concerne les anciens ateliers protégés, on entre dans le domaine de la compétition ordinaire, même si on tient compte de la spécificité de la main-d'œuvre accueillie qui est handicapée. Il faut faire très attention à cette mutation et je ne vous cache pas que, pour ma part, je suis à certains égards peut-être pas inquiet, mais préoccupé, de la situation de certaines de ces entreprises adaptées. Puisque vous constituez un réseau important, s'il y a des situations particulièrement difficiles, je vous demande de me les faire connaître.

Et puis, le troisième niveau de l'emploi est le milieu ordinaire. Avec 4,7% à peu près, il est évident que nous ne sommes pas parvenus au stade de 6%que fixait la loi comme objectif dès 1987. Les fonctions publiques d'ailleurs doivent progresser, c'est la raison pour laquelle la loi du 11 février 2005 crée un Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans les fonctions publiques (FIPHFP), que ce soit la fonction publique territoriale, de l'Etat, ou hospitalière.
N'oublions pas que l'on a ces trois secteurs qui accueillent et emploient des personnes handicapées, l'objectif étant évidemment que le droit commun soit le premier recours pour l'insertion professionnelle dans le milieu ordinaire.


Vous avez évoqué, Madame la Présidente, la loi du 11 février 2005, et je voudrais en dire deux mots, parce qu'on est, avec cette année 2006, dans l'année la plus difficile.
En 2002, il a été décidé, après tout le débat consécutif à la fameuse jurisprudence Perruche, que je ne développerai pas mais dont beaucoup se souviennent, de faire du handicap une des priorités du pays.
En 2003, le Président de la République, Jacques Chirac, après avoir pris connaissance de l'état des lieux de la compensation s'inspirant du rapport du Sénateur Paul Blanc, déclarait que les avancées considérables de 1975 avaient porté leurs fruits mais qu'il fallait tourner une page. On entrait dans une nouvelle époque, il fallait créer de nouveaux outils juridiques, que ce soit en matière de scolarité, d'accessibilité, d'emplois ou que ce soit en matière d'organisation institutionnelle de la France qui peine à s'organiser avec tout ce qui touche à la perte et au manque d'autonomie. »
En 2004, la loi est élaborée.
En 2005, les principaux textes d'application sont publiés, et on arrive ainsi à l'année 2006, l'année la plus difficile car c'est l'année de la mise en œuvre de cette loi qui représente un arsenal juridique gigantesque. La loi comporte 101 articles, et il y aura 110 textes d'application.
Or nous avons mis un terme à la politique des trente dernières années pendant lesquelles on a saupoudré les mesures au fil du temps, moyennant quoi la politique du handicap était devenue un manteau d'arlésienne, on ne s'y repérait plus. Il y avait des dispositions anciennes et des dispositions plus adaptées, il fallait mettre de l'ordre dans tout cela.
Aujourd'hui, on est confronté à la mise en œuvre d'une loi qui résulte d'une mise à plat de la situation, et de mesures qui concernent tous les aspects de la vie de la personne handicapée. Pour l'instant ce n'est pas une année facile mais on ne le regrettera pas d'ici deux à trois ans. C'est une bonne loi, même si ce n'est pas une loi parfaite. Je ne connais pas de lois parfaites. Je me méfie même de celles que l'on dit parfaites. Les lois parfaites n'existent que dans les états totalitaires où la loi est la traduction juridique d'une doctrine. En l'occurrence, cette loi est le fruit d'un compromis. Quand on parle d'accessibilité, il y a la pression légitime des personnes handicapées mais il y a aussi la pression de toute une série de lobbies. Dans une société démocratique, toute loi est un compromis, et il faut simplement que ce compromis soit le meilleur possible.

En 2006, il nous faut donc :
- Interpréter les textes
- Mettre en place les bases, en particulier les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), un travail laborieux et difficile, qui se fait en plus dans un contexte qui n'est pas toujours idéal.

Il ne faut pas perdre le cap, et le cap c'est quoi ?
Pendant trente ans un système qui, lorsqu'il a été institué, constituait une avancée majeure, a installé une personne dans un « dossier », souvent sans l'entendre. Et puis on a soumis ce dossier à l'épreuve d'un barème. On disait : "Voilà, il ou elle a tel ou tel handicap, voilà l'orientation qu'il lui faut etc., etc." Ceux qui le faisaient, et il y a en certainement dans la salle, (en particulier dans les commissions COTOREP, CDES), ont très bien fait leur travail, avec les moyens qu'ils avaient. Il ne s'agit pas de leur jeter la pierre, ils ont fait au mieux qu'ils pouvaient. Aujourd'hui, il faut cependant tourner la page de ce système et cela ne se fera pas en un mois, ni en six mois, ni en un an.
Je pense que pour atteindre sa vitesse de croisière, cette énorme réforme a besoin de trois ans. C'est considérable, alors que dans le même temps, des hommes et des femmes attendent, et qu'il faut pallier au plus pressé, résorber les retards. Tout cela incombe au département, Monsieur le Vice-président, et ce n'est pas une tâche aisée.
Le handicap n'est pas uniquement un obstacle à l'accomplissement des actes ordinaires de la vie, il est aussi, si la société ne prend pas les dispositions contraires, un obstacle à la réalisation de ce que la personne handicapée veut être dans la cité. C'est fondamental. Le nouveau système doit se matérialiser par des dispositions concrètes. Il faut qu'un projet de vie soit exprimé, et qu'un plan de compensation, à l'intérieur duquel on mettra l'emploi, ne soit pas octroyé mais discuté, évalué, suivi.
Donc cette mobilisation, cette création de liens, entre les associations, les politiques, les entreprises auxquelles vous contribuez, est une manière de prendre sa place dans la mise en œuvre de cette loi.

C'est pourquoi nous avons entamé une grande tournée régionale, dans toutes les régions, avec Monsieur Philippe Bas, Ministre Délégué aux personnes handicapées, dont l'objectif est de dire : "Où en est-on? Qu'est-ce qui marche, (c'est important de signaler aussi ce qui fonctionne), mais aussi qu'est-ce qui ne va pas, qui est difficile d'interprétation et de mise en œuvre". A la faveur de ces réunions, des dispositions modificatives ont déjà été prises. C'est comme dans un département, une entreprise, un CAT, une famille, quand on se projette dans l'avenir on n'a pas toujours tout évalué, c'est normal.

Je voudrais terminer sur une projection de la question du handicap dans notre société.
Au XIXème siècle, le handicap était une des situations contre lesquelles il fallait protéger la société. C'était ce que l'on appelait « un fléau social », et la société s'organisait contre ce « fléau social ».
Petit à petit au XXème siècle, avec les mutilés du travail et de guerre, avec les malades de la tuberculose et de la poliomyélite, avec les parents d'enfants handicapés mentaux, on s'est éloigné de cette approche. L'idée et l'approche générale au XXème siècle ont été : voilà des femmes et des hommes qui ont des difficultés, identifions leur spécificité, et apportons-leur les réponses adaptées.
Au XXIème siècle, on en n'est plus à répondre à la demande de ces « déshérités », de ces « lointains malades de la tuberculose, de la poliomyélite », etc. Aujourd'hui la demande est toute autre. C'est d'être reconnus, regardés, considérés comme tout simplement des citoyens à part entière, avec la traduction juridique que cela implique. Si le handicap, longtemps considéré comme un fléau, est une réalité douloureuse et difficile pour celles et ceux qui le connaissent, j'ajoute que c'est en même temps un atout pour la société. Il faut que nous passions de « l'approche fléau » à « l'approche atout ». Que de progrès scientifiques, de progrès technologiques, de progrès médicaux, de progrès sociaux sont dus aux réponses que l'on apporte aux handicaps ! Regardez la salle que nous constituons, nous sommes très divers, c'est aussi un facteur de lien.

Alors, Monsieur le Président, je vous remercie d'accueillir cette manifestation dans le Toit Citoyen de la Grande Arche ; Monsieur le Président du GESAT, merci d'être à ce point acteur d'innovations, de progrès ; Monsieur le Vice-président du Conseil Général, je voudrais saluer les efforts de votre département, et de vous même qui siégez personnellement au Conseil de la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie ; Madame la Présidente, la présence du Conseil National Handicap pour sensibiliser, et former est important. Avec les associations, vous permettez de fournir des analyses, des propositions et, n'oublions pas que vous êtes largement à l'origine de la création de l'Observatoire national sur la recherche, la formation et l'innovation en matière de handicap, que j'ai ensuite été chargé de mettre en place.
Je souhaite vraiment que cette journée soit fructueuse. Tout ce qui pourra se dégager de vos réflexions en termes d'analyses et de propositions sera le bienvenu pour les pouvoirs publics et en particulier pour moi. Merci.


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